Le CES (Consumer Electronic Show) de Las Vegas a fait la part belle aux objets connectés cette année. Au-delà des objets comme le bracelet June de Netamo, la serrure Okidokeys, la pilule e-Celsius de BodyCap, le capteur Aura de Withings et la boîte aux lettres connectée Click & Collect at Home de Signée, il révèle de nouveaux usages, des stratégies commerciales innovantes et des « smart business models ».
Après un préambule général sur le CES (1ère partie : TV - 4K UHD, Voitures connectées, Impression 3D, les Français), l’article en décryptera quelques clés et mettra en perspective la place des Français dans le domaine des objets connectés (2ème partie, Netatmo, Withings, Parrot...).
Un dernier article (3ème partie) présentera les mouvements tectoniques qui se mettent en place dans les objets connectés avec Qualcomm, Intel ...
Vue Générale
Le CES concentre des quantités d'acteurs différents, des grands fabricants Samsung, LG, des constructeurs automobiles (voitures connectées en particulier), des entreprises et startups française d'objets connectés notamment, des fabricants de composants et processeurs (Intel, Qualcomm, TI…) jusqu'à une myriade de petits acteurs chinois (beaucoup de Schenzen) et même des artisans.
TV - 4K / Ultra HD
L’UHD a désormais une chaîne de production UHD de bout en bout. En effet, proposer du contenu Full HD (1920*1080 soit environ 2 million de pixels), en upscalant à 4k (4K – UHD : 3840*2160 soit environ 8 Million de pixels) a peu d'intérêt.
Sur la résolution des écrans, il semble qu'on arrive au bout de la course aux pixels car la différence entre du Full HD (2 M pixels) et du UHD (8 M pixels) n'est déjà pas évidente pour tout le monde, à moins d'avoir le nez collé à l'écran.
Les feux de la rampe se sont éteints pour les écrans 3D, même s’il y a encore quelques démonstrations. Alors après la 4k, qu'y aura-t-il ? Les Curved Tv pour immerger encore plus le téléspectateur... mais au détriment de ceux qui ne sont pas face à l'écran.
Si vous voulez du vrai immersif, autant aller chez Oculus qui a fait un tabac avec son casque à réalité augmentée.
Voitures connectées
Les voitures deviennent de plus en plus connectées. Le plus grand challenge pour cette industrie est de combiner des cycles de développement et de vie très différents (PLM – Product Life Management) entre le monde de l’industrie automobile (généralement de 1 à 3 ans entre la conception et commercialisation d’une voiture selon la réutilisation ou non de plateformes, architecture, technologies … antérieures) et le monde de l’Internet et Internet Of Things et du smartphone (de moins de 6 mois à instantané pour des smartphones, interfaces, des services, OS avec la possibilité d’upgrader tout un parc en quelques instants).
La tendance est au remplacement des compteurs dédiés et spécifiques (jauge, vitesse…) par des écrans standardisés qui à l’image du smartphone peuvent afficher tout. L’exemple le plus frappant est celui de Tesla (absent au CES) qui est allé le plus loin dans la démarche en mettant deux écrans, paramétrables.
Le HUD (Heads Up Display) fait aussi une entrée en force pour éviter les aller-retours dangereux entre l’écran et la route. L’intérêt d’intégrer des écrans est que cela peut être conçu dès le départ dans le développement produit usuel d’une voiture. En revanche, le contenu de l’écran peut être modifié comme l’interface d’un smartphone à la volée. Ceci est d’autant plus vrai, que les voitures commencent comme Chevrolet à intégrer la 4G.
Le consortium «Open Automotive Alliance », mis en place par Google et regroupant notamment quatre constructeurs automobiles (Audi, General Motors, Honda et Hyundai) a pour objectif d’intégrer, dès la fin 2014, le système d’exploitation Android, dans les systèmes embarqués des voitures et permettre au conducteur d’avoir accès aux mêmes contenus (boutique d’applications Playstore avec la musique, les vidéos, les services géolocalisés associés...) que ceux disponibles sur son smartphone ou sa tablette. (cf : Article Les Echos).
Au-delà des applications liés au smartphone, la prochaine révolution dans le domaine des voitures connectées est l’utilisation des données pour améliorer le trafic, la sécurité, le stationnement, le consommation d’énergie ... (Article ZDnet : Aux États-Unis, les voitures connectées pourraient devenir obligatoires dès 2017). Question intéressante, est-ce que des communications voiture-à-voiture voire des réseaux mesh apparaîtront ou resterons-nous sur une infrastructure traditionnelle avec un ou plusieurs opérateurs mobiles ? Ceux-ci recueilleraient, concentreraient et redispatcheraient l'information même si deux voitures sont à quelques mètres l'une de l'autre. Pour des raisons de couverture, de délai de latence, de résilience notamment, les deux moyens se dévelepperont de manière complémentaire.
Un point néanmoins à ne pas oublier est qu’un bug sur un smartphone ne présente pas de risques majeurs, c’est très différent pour une voiture comme nous rappelle la fameuse légende urbaine sur la comparaison par Bill Gates entre l’industrie informatique et General Motors et la réponse de General Motors :
« If GM had kept up with the technology like the computer industry has, we would all be driving $25.00 cars that got 1,000 miles to the gallon. »
Answer :
« If GM had developed technology like Microsoft, we would all be driving cars with the following characteristics:
1. For no reason at all, your car would crash twice a day.
2. Every time they repainted the lines on the road, you would have to buy a new car...»
En réalité, Bill Gate ne l’a jamais dit ! : Lien pour plus d’infos)
Impression 3D
De quelques exposants, nous sommes passés à une zone d’exposition 3D Printing de 28 entreprises. Les fabricants d’imprimantes 3D (B2B: Stratasys, B2B & B2C : 3D Systems, B2C : Makerbot, Cubify ... Comparatif) et les sociétés fournissant la fabrication de pièces 3D se sont fortement développés Sculpteo, Shapeways, i.materialise (cf Comparatif).
Il y a bien sûr quelques master pieces comme l’orchestre en 3D ou l’impression alimentaire de bonbons … Encore quelques années et demain vous irez chez votre boulanger, lui transmettrez une photo 3D de votre chère et tendre et repartirez en quelques minutes, avec une sculpture de son visage en chocolat, vous réalisirez vos meubles de cuisine sur-mesure pour un prix défiant toute concurrence ainsi que les ustensiles moulés à la forme de votre main.
Pour le grand public
Les principales évolutions sont le développement d’imprimantes 3D personnels (à partir de 350$ mais une imprimante 3D de qualité coûte plus de 1000 € aujourd'hui) avec des produits comme Cube 3 et MakerBot Replicator 5 qui deviennent des photocopieuses 3D proposant le scanner 3D et l’imprimante 3D (il ne fait pas encore la couleur ;). L'année prochaine se sera certainement intégré dans le même produit.
En terme d’usages, quelques usages à forte croissance :
- l’impression de pièces détachées (qui peuvent être agréées par le fabricant voire même qui prévoit leur intégration dans la conception du produit afin qu’une pièce défaillante puisse être facilement remplacée par une pièce imprimée ce qui réduit les appareils jetés pour des pannes mineures ) : outils, jouets, appareils électro-ménagers…
- des prothèses (dentaires, d’articulation … car elles sont nécessairement sur-mesure en fonction de la morphologie du patient et remplace des procédés actuels qui sont manuels et longs à fabriquer),
- des bijoux (impression 3D avec de l’argent ou de l’or … et permet de créer des objets personnalisés et trop complexes à fabriquer autrement)
- du textile (la mode sur-mesure, personnalisée à prix accessible ...)
- Et bien sûr tous les objets personnalisables (coques de smartphone, objets décos, accessoires, bibelots…)
Pour les entreprises
Dans le domaine des services d'impressions 3D (cf Article Sculpteo sur Batch Control Option pour faciliter la production de masse), la principale révolution est le basculement de la petite série à la grande série réalisée aujourd'hui en Chine. Aujourd'hui, il est moins cher de produire en Chine à partir de quelques milliers de pièces, mais ce seuil évolue rapidement.
Produire en France deviendra de plus en plus rentable car
- vous avez une réactivité accrue (idéal pour faire du supply-on-demand qui mobilise beaucoup moins de capital, pour accélérer le délai entre conception et fabrication et modifier un produit en fonction des retours de vos clients, si vos usines d'assemblage sont proches des usines de fabrication de pièces imprimées en 3D)
- vous avez un seul composant au lieu d'un assemblage de plusieurs composants (réduisez les problématiques de collage, vissage... et de recyclage)
- vous pouvez utiliser le même système de production pour des petites et grandes séries
- vous pouvez personnaliser facilement en masse ce qui d'ailleurs est un levier pour vous différencier de vos concurrents ou d'augmenter vos marges
A ce titre, Eric Carreel a été particulièrement visionnaire en étant à la tête de deux entreprises Sculpteo (créée en 2009) et Withings (créée en 2008) qui sont sur deux secteurs en plein boom et qui collaborent certainement de plus en plus dans la création d'objets connectés. D'autre part, étant à la tête du plan objets connectés, il incarne parfaitement la volonté de créer des usines en France étant concerné au premier chef par la nécessité d'avoir un cycle court pour ses produits connectés et avoir les meilleures armes vis-à-vis de ses concurrents américains comme Fitbit, iHealth et Jawbone.
Les principales évolutions sont sur le plan technique :
- la rapidité d'impression à un coût de plus en plus bas
- la multiplication des matières et l'utilisation de matières courantes dans chaque industrie (or, titane, aliments, textile, aliments...) puis leur assemblage
- l'intégration automatisée de plusieurs couleurs (aujourd'hui, la plupart du temps, les objets multi-couleurs comme les figurines sont peints à la main)
- une facilité accrue de répliquer un objet et de le modifier (scanner 3D, outil pour modifier, impression 3D)
En terme de business :
- une verticalisation de l'impression 3D dans certains secteurs (médical, aéronautique, bijouterie, textile...) avec des outils spécialisés à ces secteurs et contraintes
- des partenariats entre des sociétés réalisant des impressions 3D de masse et des fabricants de produits pour proposer des pièces détachées ou des upgrades matériel de produits à leurs clients
- une réglementation sur la responsabilité lors de l'intégration de pièces imprimées en 3D dans des produits
- une décomposition de la conception produit et de sa fabrication avec le développement des plateformes de modèles 3D et de "makers" qui fabriqueront sur base de n'importe modèle
Les Français
Concernant les français, il suffit de tendre l'oreille pour remarquer qu'ils sont nombreux à visiter le CES. Olivier Ezratty donne notamment un bon aperçu de la présence française (Rapport CES 2014 - p39 et suivantes )
D’autre part, le déplacement de Fleur Pellerin et de Pierre Gattaz contribuent à asseoir notre présence.
Mais nous aurons l'occasion dans le prochain article de couvrir plus amplement les sociétés françaises en particulier dans le domaine des objets connectés.
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